CLINT EASTWOOD (31-5-1930)
son nouveau western : Cry Macho
Lassé de la série RAWHIDE et des conditions de travail que lui imposaient au début des années 60 les producteurs de la chaîne CBS, Eastwood eut l’audace en 1964 d’aller tourner en Europe un western au ton sarcastique pour seulement 15 000 dollars. Comme d’autres stars qui ont l’idée géniale de tenter l’aventure européenne (plus tard Charles Bronson, Lee Van Cleef), Clint accède du jour au lendemain, à la célébrité internationale : c’est « Pour une poignée de dollars », en 1964…

by StephenAbbot
Depuis, avec une oeuvre dense et originale, que ce soit devant ou derrière la caméra, il est devenu, avec Kevin Costner, le représentant emblématique d’un genre qu’on croyait, à une certaine époque, moribond. John Ford lui-même, ne déclarait-il pas, déjà, dans les années 60, « Le western est mort » ?
A la sortie de Pour une poignée de dollars, les critiques américains flinguent le film accusé de « salir » le genre, alors que lui et Leone sont en train de lui donner un nouveau souffle, à la sauce italo-espagnole : peut-on compter le nombre de productions, inégales, qui ont suivi, dans les années 60 et 70 ? La plupart avec un déferlement de violence, pour attirer dans les salles des spectateurs de plus en plus scotchés devant leur petit écran
Dès la fin des années 70, les effets spéciaux l’emportent et le western ne peut rivaliser avec les scènes spectaculaires des films d’anticipation et d’action comme RAMBO ou ALIEN, ou avec les polars urbains dont vont raffoler les spectateurs, comme LE JUSTICIER DANS LA VILLE…
Né à San Francisco en 1930, Clint Eastwood décroche d’abord des petits rôles à l’Universal, on le voit dans deux westerns en 1956 : La corde est prête et La V.R.P. De Choc (son premier rôle parlant), puis encore dans Le cri de guerre des Apaches… Après quoi il va incarner de 1959 à 65 Rowdy Yates dans la série à succès Rawhide
Son allure sympathique et souriante, son charisme, son flegme et sa sveltesse emportent l’adhésion… surtout auprès des femmes !
C’est alors qu’il accepte de tourner en Espagne en 64 Pour une poignée de dollars dirigé par un Italien. Pari risqué mais gagné : succès planétaire
Avec ce western-spaghetti, il impose la nonchalante silhouette du pistoléro aux yeux plissés mâchant son cigarillo, avec poncho et sombrero. Personnage plongé dans un univers violent, sorte de BD au vitriol
Un personnage qu’il a contribué à créer, intervenant sans cesse pendant le tournage aussi bien sur les costumes que les répliques ; et dans sa bouche, les répliques font systématiquement mouche !

Clint Eastwood by Mario

La désormais fameuse « dollars trilogy » sera complétée par Et pour quelques dollars de plus, en 1965 et Le bon, la brute et le truand en 1966. Brelan d’as ! De retour aux Etats-Unis, Eastwood crée sa propre maison de production, Malpaso, et entame une collaboration fructueuse avec le cinéaste Don Siegel. Il apparait dans une série de westerns singuliers, dont certains directement influencés par le genre « spaghetti », il rompt avec le classicisme des westerns des années 50 et ouvre une nouvelle voie au western américain
https://youtu.be/QBI9Nucp1Xg?list=PLCZOoG9flr0jfSdq3dEOTLK519cec19yT
Dans Pendez-Les Haut Et Court (1968), de Ted Post, premier western qu’il produit, il se venge d’une troupe de cowboys qui l’avaient lynché
Dans La Kermesse De l’Ouest (69), il fait équipe avec Lee Marvin et tombe amoureux de Jean Seberg ; clin d’oeil à ses westerns spaghetti, son personnage n’a pas de nom, Marvin le surnomme « Partner », mais le film est un échec ; dans Sierra torride (70), c’est un mercenaire qui sauve une bonne sœur, en réalité fille de joie ; dans Les proies, un soldat nordiste blessé recueilli dans un pensionnat sudiste pour jeunes filles
Avec Joe Kidd (1972), de John Sturges, où il campe un « étranger » sorti de prison qui se retrouve au milieu d’un conflit éleveurs/fermier d’origine mexicaine. Et il décide de passer derrière la caméra pour UN FRISSON DANS LA NUIT puis L’Homme des Hautes Plaines (1973) et Josey Wales, Hors-La-Loi (1976)
https://youtu.be/2qbQNVaEZ2A
Dans une période où le western s’écroule (dès 1975), Eastwood abandonnera, comme tant d’autres le genre -excepté avec Bronco Billy (1980) western moderne-, car il n’est plus rentable…
Pour revenir, comme acteur et réalisateur, en 1985 avec le magnifique chef d’œuvre Pale rider. Et Impitoyable en 1992, il campe un fermier alcoolique traquant deux hommes ayant mutilé une prostituée : Oscars de meilleurs film et réalisateur, succès. Encore en 2021 acteur et réalisateur d’un western qu’il joue et réalise, produit par Malpaso, Cry Macho, il interprète un ex-rodeoman devenu dresseur de chevaux

Clint Eastwood fait partie de ceux qui ont osé relancer le western dans les années 80-90, encore un pari risqué, mais qui a porté ses fruits. Il est incontestablement et définitivement le nouveau Duke du Western de la fin du XXè siècle !
Un de mes articles écrits dans la presse magazine sur Clint et une interview de lui dans Ciné Revue 1967 :
Box-office. En 1971, un sondage fait auprès des exploitants de salles américains plaçait John Wayne en tête du box-office et Clint Eastwood en 2è position. En 1972, Eastwood avait pris la place de Wayne, tombé au 4è rang. En 73, Eastwood est toujours n°1, et Wayne n’est plus qu’à la 9è place

by didgiv

dessin de Didgiv
♦ Avril 1965 :
Pour une poignée de dollars bat tous les records de recettes en Italie. Clint Eastwood commence à Rome le tournage de la suite, Et pour quelques dollars de plus – Cinémonde dans son numéro « western » du 6 avril évoque les deux films et présente « un acteur inconnu en France, un géant de 1m98 qui rêve de faire une carrière de réalisateur à la Ernst Lubitsch« . Rêve qui sera réalisé quelques années après le succès de la trilogie des dollars
Sierra Torride/Two mules for sister Sara -Mexicano-américain de Don Siegel (1970)
D’après une histoire de Budd Boetticher
Musique : Ennio Morricone
Avec Clint Eastwood (Hogan), Shirley MacLaine (Sara), Manolo Fabregas (colonel Beltran), Alberto Morin (général LeClaire)
XIXe s., lors de l’intervention des Français au Mexique envoyés par Napoléon soutenir Maximilien, Hogan, aventurier américain, sauve une bonne sœur que trois bandits tentaient de violer. Elle lui dit être une résistante juariste pourchassée par les Français occupant la garnison dont Hogan est chargé de s’emparer du trésor qu’elle renferme. Sara est en réalité une prostituée déguisée en nonne qui fuit la répression…
Production américano-mexicaine financée par la société de production qu’Eastwood fonda à son retour aux Etats-Unis, après son expérience dans le western-spaghetti. Sierra Torride ressemble d’ailleurs à ce genre de film, on peut considérer que c’est un western-Zapata (américain), films pro-révolutionnaires mexicains
Ce long-métrage insolite, énorme succès en France, oscille entre comédie et film d’action, il est bourré d’humour et a un ton décalé, des dialogues subtils, un scénario peu banal (signé Budd Boetticher) qui réserve des surprises… dont l’identité réelle de l’héroïne, pas si catholique qu’elle le parait ! Shirley MacLaine campe cette étonnante nonne qui fume en cachette le cigare, aime le whisky et emploie des termes grossiers qui étonnent l’Américain avec qui elle fait la route
Décalé, comme tous les westerns d’Eastwood, et comme le thème musical surprenant d’Ennio Morricone, évocant le cri d’une mule et d’un serpent à sonnette, qui a été repris par Quentin Tarantino au début de son DJANGO UNCHAINED. Bel hommage au maestro !
Pale rider-De Clint Eastwood (1985)
Scénario : Michael Butler, Dennis Shryak
Musique : Lennie Niehaus
Avec
Clint Eastwood : le pasteur
Michael Moriarty : Hull Barret
Carrie Snodgress : Sarah Wheeler
Chris Penn : Josh LaHood
Les derniers chercheurs d’or indépendants d’une bourgade minière de Californie sont terrorisés par les hommes de LaHood, qui a fondé la ville et exploite la mine, il veut expulser ceux qui ne lui appartiennent pas. Un cavalier solitaire, pasteur, venu de nulle part, arrive dans la ville, c’est « le prédicateur »
Retour de Clint Eastwood au western -dernier qu’il réalisa et interpréta était Josey Wales en 1976-, avec le rôle d’un prêcheur mystérieux, comme il les affectionne, tout droit inspiré du chef d’oeuvre L’Homme des vallées perdues (53). Pas vraiment un remake comme cela a été écrit car on n’a pas le personnage de l’enfant, et les mineurs remplacent les fermiers. Eastwood campe avec talent cet être laconique, presque surréaliste, cavalier quasi-mystique qui vient dans une communauté menacée par un danger rendre justice, et une fois sa mission remplie, repart d’où il venait… on ne sait pas où. Ce personnage sans attaches se rapproche aussi de ceux qu’il campait dans les western-spaghetti de Sergio Leone
Western percutant dans la lignée des classiques, qui valut à Eastwood une nomination à la Palme d’or de Cannes 1985, et le Young Artist Award 86 pour l’actrice Sydney Penny. Succès : budget de 7 millions de dollars pour 41,4 millions de recettes aux Etats-Unis seuls !
Pale rider redore au milieu des années 80 le blason du western, qui était devenu un genre moribond et agonisant avec la fin du western-spaghetti, et plusieurs échecs cinglants de grosses productions américaines comme La porte du Paradis en 1980…
Cry Macho (2021) de Clint Eastwood
Une ex-star du rodéo doit ramener un jeune garçon fugueur, vers son père rancher, loin de sa mère mafieuse et alcoolique. Au cours de leur voyage à travers le Mexique rural, à destination du Texas, le vieux cowboy noue un lien très fort avec le jeune garçon qui ne se sépare pas de son coq de combat
Avec Clint Eastwood, Dwight Yoakam, Daniel V. Graulau, Amber Lynn Ashley, Britnee Ratledge
Road-movie initiatique et méditatif à travers le Mexique, les images sont superbes, c’est plein de bons sentiments mais les critiques sont assez unanimes : c’est loin de faire partie des meilleurs films d’Eastwood, avec des longueurs et quelques incohérences scénaristiques. On retrouve une thématique proche de Bronco Billy, Gran Torino (vétéran acariâtre qui s’entiche d’un garçon d’origine coréenne), ou encore Une nouvelle chance (un recruteur de base-ball tente de reconquérir sa fille dont il s’est peu occupé). Le fameux chanteur de country Dwight Yoakam joue le père qui veut « récupérer » son fils… Bon interprète dans une distribution inégale

Le roman Cry Macho de N. Richard Nash sort en 1975. Les producteurs s’y intéressent et pensent à Eastwood, Roy Scheider, Burt Lancaster, Pierce Brosnan ou Arnold Schwarzenegger pour le rôle principal. En 88, Eastwood songe à l’adaptation de Cry Macho, mais il doit d’abord tourner La dernière cible (1988). En 1991, le tournage d’une adaptation de Cry Macho débute avec Roy Scheider mais le film ne sera jamais achevé… En 2003, Schwarzenegger est annoncé dans le rôle principal. Cependant, en raison de son mandat de gouverneur de Californie, il n’est pas disponible. En 2011, Schwarzy annonce que Cry Macho sera son premier projet après la fin de son mandat. Ce projet est abandonné… En octobre 2020, Clint Eastwood producteur reprend le projet comme producteur.